ART EN RE TRAITS

Art en Re Traits

Pendant une vingtaine d‘années, j’ai choisi de peindre en «grisaille» sur fond monochrome. Une contrainte volontaire, presque un défi, qui m’a permis d’explorer en profondeur la puissance des nuances et des tensions chromatiques crées par la couleur crée, reprise et confrontée au noir et blanc.
Le vert tige, par exemple, est devenu, pendant deux années, une obsession.
Une couleur vive, vibrante, presque acide, qui jaillit comme une tige poussant dans l’espace blanc.
Ce vert dialogue avec le noir, qui structure, et avec le blanc, qui libère.
Ensemble, ces trois teintes créent une dynamique unique, oscillant entre ancrage et légèreté, où chaque composition devient un équilibre fragile et précis.
Ce jeu de mots, «vert tige/vertige», illustre ma démarche : repousser les limites du minimalisme chromatique pour susciter des émotions profondes, parfois déstabilisantes.
Ces années de travail, en grisaille, sur fond monochrome ont transformé ma manière de créer. En limitant mes outils, j’ai gagné en liberté. Les gestes sont devenus plus précis, le regard plus attentif. Chaque couleur porte un poids, chaque choix est une décision consciente, amplifiant l’intensité et la signification de chaque composition.

De 1980 à 2002, partant de l‘observation d‘une couverture plissée je laissais mon imagination se perdre dans une succession de jeu de courbes et contre-courbes, de lumières et d‘ombres, de creux et de pleins jusqu‘à produire des peintures qui, bien que visiblement abstraites, bordaient d‘une sensualité quasi-charnelle.
Cette pratique a donné naissance à des œuvres à la fois simples et complexes, où l’économie de moyens révèle une richesse insoupçonnée.
Cette contrainte m’a aussi permis d’approfondir ma réflexion sur la lumière et l’espace. Avec trois couleurs seulement, j’ai dû apprendre à jouer avec les contrastes, à créer du volume, à suggérer des dimensions cachées.
Les limites que je m’imposais n’étaient pas un frein, mais un terrain de jeu infini où chaque nuance devenait une révélation.

Aujourd’hui, ces œuvres résonnent comme une célébration du peu et du tout.
À travers ce travail, je cherche à montrer qu’en partant de presque rien, il est possible de toucher à l’essentiel, d’atteindre une forme de vertige – celui de l’émotion pure, née de la rencontre entre la couleur, la lumière et le regard.
Mon souci premier étant de nous ouvrir sur ce qui se noue et se dénoue dans les profondeurs humaines.
Une vingtaine d’années, plus tard, la série «Vert Tige» s’ouvre à «Vert Tige+» (+ une nouvelle couleur).
Après une décennie passée à explorer la richesse la peinture en «grisaille» des fonds monochromes j’ai ressenti le besoin d’élargir ma palette.
Ce moment marque une transition, une libération : je m’accorde désormais une autre couleur (+) mais toujours avec la même exigence, la même recherche d’équilibre et de tension.
Le geste reste le fil conducteur, l’épine dorsale de mon travail.
Mais les nouvelles couleurs viennent dialoguer avec lui, le bousculer, le compléter.
Chaque teinte ajoutée s’impose comme une évidence, choisie pour ce qu’elle apporte au récit visuel, qu’il s’agisse d’une chaleur inattendue, d’un contraste plus doux, ou d’une intensité supplémentaire.
Cette évolution est à la fois technique et symbolique.
Pendant des années, me limiter à la peinture en «grisaille» sur fond monochrome a été un exercice de concentration et de dépouillement, une manière de trouver l’essentiel dans la contrainte.
Aujourd’hui, élargir ma palette, c’est m’autoriser à explorer d’autres émotions, d’autres nuances de lumière et de vie.
Ce n’est pas un renoncement, mais une ouverture, une nouvelle étape dans un processus toujours en mouvement.

Chaque couleur + est un espace d’expérimentation et de réinvention.
À travers elles, je cherche à conserver l’intensité et la simplicité qui caractérisaient mes premières œuvres, tout en y insufflant une dimension nouvelle.
La couleur supplémentaire ne vient pas effacer la rigueur des débuts, mais enrichir un langage visuel que j’ai patiemment construit au fil des années.
Ainsi, «chaque nom de teinte que j’ai crée se pare d’un +» devient un nouveau chapitre.
Une série qui continue de se tenir entre tension et équilibre, entre sobriété et audace.
Chaque tableau témoigne de cette quête inlassable : celle de donner du sens à la couleur, de transformer la lumière en émotion, et de faire dialoguer les limites avec l’infini des possibilités.
Plus de quarante ans, plus tard, en 2023, j‘ai repris «Art en Re Traits» pour les travailler sur toile libre au format 42×56. Cette nouvelle série s‘intitule «Inné Dits»